Récemment, nous avons assisté à un webinaire mis en place par le Miroir Social avec comme invités des responsables du groupe AXA et de plusieurs organisations syndicales.

Rodolphe Helderlé, responsable éditorial du Miroir Social, a introduit le sujet en rappelant que le dernier sondage réalisé par Réalités du Dialogue Social montre un manque de réflexion quant à la gestion des emplois et des parcours professionnels face au changement climatique. L’idée derrière cet échange était de voir quelle place est donnée à ce sujet et comment peut-on espérer un renforcement progressif de la prévention de la santé au travail. 

Ainsi, Sophie Mandelbaum, chargée des partenariats avec les partenaires sociaux chez Axa Santé et Collectives, a cherché quel impact le réchauffement climatique aurait, à l’avenir, sur la santé, et plus particulièrement, la santé au travail. Elle regrette d’ailleurs que la prévention ne soit pas plus présente. A ce propos, même le DUERP, dont la présence est obligatoire, ne serait pas toujours formalisé, en particulier dans les petites entreprises. Une fois les résultats obtenus, elle n’a pas hésité à demander aux représentants des salariés de se pencher sur des méthodes visant à améliorer nos fonctionnements en termes de protection sociale et de prévention.

Le point de bascule

Suite à cela, Laura Ansses, responsable de l’offre services santé, innovation, climat pour AXA Santé et Collectives a pris la parole. Pour elle, la société doit avoir en tête non seulement le risque matériel, mais surtout le risque humain autour des enjeux environnementaux auxquels nous sommes confrontés. En effet, autrefois nous pensions le changement climatique comme une série d’événements extrêmes mais sans pour autant en ressentir le quotidien.  Par conséquent, nous observions uniquement l’impact qu’il pouvait créer sur nos biens matériels. Cependant, une bascule s’est opérée ces dernières années. Depuis, les citoyens réalisent que ce bouleversement touche ce qu’ils possèdent de plus précieux, autrement dit, leur santé et celle de leurs proches. Par exemple, une canicule peut autant causer un incendie qu’impacter les salariés par des vagues excessives de chaleur. Ces mêmes excès, sur le plan humain, conduiront à leur tour à des épuisements, du stress thermique ou encore l’apparition de maladies cardiovasculaires.

Contrairement aux idées reçues, le changement climatique ne concerne pas seulement les variations de température, le déséquilibre des eaux ou les catastrophes naturelles. En effet, il peut développer différentes pathologies pour l’Homme de manière directe ou indirecte et physique ou psychologique. Ainsi, le directeur médical d’Axa France s’est chargé de décrypter le sujet d’un point de vue plus scientifique. Il a d’ailleurs remarqué une augmentation de certaines pathologies et l’arrivée de maladies qui n’étaient auparavant présentes que dans des zones particulièrement chaudes. Le moustique tigre en devient l’exemple parfait étant donné qu’on le retrouve désormais dans près de 3/4 des départements français. 

Autres conséquences

Cependant, les externalités négatives liées à la dérive climatique ne s’arrêtent pas là. En effet, la pollution serait source d’une forte augmentation des allergies. Le fait qu’une personne sur 2 sera allergique d’ici 2050 (selon l’OMS) s’explique également par nos choix de vie.

En d’autres termes, nos modes de vie ont considérablement affecté notre système immunitaire en raison de notre alimentation ultra transformée, de nos environnements parfois trop aseptisés ou de l’exposition à plusieurs polluants sur notre lieu de travail. Il est donc possible, à notre échelle, d’agir sur certains de ces éléments.

Quant à l’aspect économique, l’organisation internationale du travail estime que les pics de chaleur risquent de coûter à l’économie mondiale plus de 2000 milliards de dollars par an dès 2030. Cette perte d’argent pour les entreprises sera majoritairement due à la baisse de productivité humaine causée par les prochains pics de chaleur.

Lors de cet évènement, un autre problème relatif à la santé a été soulevé.  En effet, l’enjeu de la préservation des vies humaines face au climat se joue à différents niveaux étant donné qu’il y aurait de plus en plus d’éco-anxieux à travers le monde. De ce fait, parmi la population française, 80% des citoyens se disent inquiets des conséquences du dérèglement climatique. Ainsi, ce problème environnemental doit devenir l’affaire de tout le monde.

Concernant les initiatives déployées par Axa, l’équipe assure s’entourer d’experts en interne afin d’être au plus près du sujet et d’agir de façon pertinente. A ce propos, ils soutiennent également plusieurs projets de recherche sur la santé environnementale via leur mutuelle.

Par la suite, Michael Pinault, le coordinateur du réseau des sentinelles vertes, concept lui-même initié par la f3c-cfdt (fédération communication conseil culture), a pris la parole. Celui-ci s’est demandé comment s’assurer que les sociétés vont prendre soin de la santé de leurs salariés ? De plus, il a insisté sur l’importance du plan immobilier et la nécessité de disposer d’un « thermomètre », qui reste à inventer, pour suivre les retombées des actions mises en place. Afin d’aider les entreprises à se lancer, son syndicat a imaginé la « fresque du pouvoir d’agir en entreprise ».

De nouvelles normes ?

Madeleine Gibert, responsable de la partie transition développement durable à la confédération CFE-CGC a alors proposé de nouvelles normes préventives afin d’inciter les dirigeants à se préoccuper de la sécurité mentale et physique de leurs employés. En effet, elle n’a pas manqué de rappeler que, dans les anciens CHSCT, n’importe quel projet pouvait se stopper lorsqu’il présentait un risque pour la santé d’un individu. Cependant, ils ont depuis disparu et il devient plus difficile de dénoncer des situations dangereuses. Le problème étant que les risques psychologiques vont s’accroitre avec le dérèglement climatique et qu’il semble nécessaire de réfléchir à des leviers d’actions en cas de problème.

( Si vous voulez en savoir plus au sujet des CHSCT, n’hésitez pas à aller voir cet article : https://lediag.net/2018/11/moins-delues-pour-faire-autant/ )

Infographie représentant le décalage entre les associations et les autres entités sur l’aspect environnemental.

Enfin, Emmanuelle Lavignac, représentante de la CGT, a également expliqué que la santé au travail implique nécessairement des questions de territoire. Par exemple, certaines entreprises auraient installé des alertes en cas de pic de pollution ou de chaleur afin de prévenir leurs employés avant qu’ils ne quittent leur domicile. Pour sensibiliser les entreprises, son organisation propose de s’appuyer sur le radar travail environnement.

Armand Blondeau, coprésident du printemps écologique, a alors rappelé qu’étant donné que nous passons beaucoup de temps sur notre lieu de travail, l’entreprise semble être le terrain adéquat quant à la mise en place de mesures de prévention à destination des salariés. Il est donc parfaitement logique que n’importe quel employeur favorise à son équipe un accès rapide auprès de professionnels de santé, lui permette de s’arrêter durant les heures chaudes et investisse dans des équipements supplémentaires. A ce propos, son organisation propose aussi un outil pour permettre aux salariés et représentant du personnel d’aborder ces sujets : il s’agit du diagnostic outil cse.

Pour finir, ils ont également introduit une notion qu’ils qualifient d’adaptation. A travers celle-ci, l’idée serait, une fois de plus, de mettre en place une série de mesures afin d’atténuer les effets néfastes du réchauffement terrestre. Cependant, ils ont tout de même précisé qu’augmenter la climatisation au sein des locaux ne figure pas parmi les bonnes résolutions : il s’agit là d’une mauvaise adaptation.

Tous acteurs

Ainsi, l’idée principale serait de devenir un véritable acteur sur le plan climatique, que ce soit pour les personnes en charge de la sécurité au travail, de la santé au travail, les employeurs, les organisations syndicales, la médecine du travail et, évidemment, le salarié lui-même. Il s’agit donc d’un travail collectif visant à prévenir ces nouveaux risques.