Nous avons tous déjà vécu de fortes chaleurs ou des pluies torrentielles. Ces évènements météorologiques vont malheureusement empirer à cause du réchauffement climatique. 

C’est pour échanger sur ces défis que le journal Le Monde a organisé ce 19 Novembre, en collaboration avec Météo France, une conférence intitulée « s’adapter face aux extrêmes climatiques, un défi majeur qui s’anticipe ». 

Valérie Schwarz, présidente-directrice générale de Météo-France a ouvert cette conférence en annonçant que, depuis 2000, les vagues de chaleurs sont 4 fois plus fréquentes. La sècheresse du sol a doublé et les pluies extrêmes ont augmenté de plus de 10% depuis les années 60.

Organiser la résilience 

Les fortes chaleurs vont s’intensifier progressivement. Une augmentation de la température moyenne de 1,5°C est prévue pour 2030, puis +2,4°C pour 2050 et +4°C en. En parallèle, nous devons nous attendre à 20% de précipitations de plus en hiver. 

Afin d’anticiper au mieux ces évènements, Météo France pilote un dispositif d’observation de l’atmosphère qui est en constante amélioration. Il s’agit de rendre la société  davantage résiliente, notamment en organisant une journée nationale de la résilience (JNR) qui a lieu cette année le 14 octobre. Le portail DRIAS, mis en œuvre par Météo-France en lien avec la communauté scientifique nationale du climat a pour vocation de mettre à disposition des projections climatiques régionalisées de référence. Les informations climatiques sont délivrées sous différentes formes graphiques ou numériques et intègrent notamment la représentation selon la Trajectoire de Réchauffement de Référence pour l’Adaptation au Changement Climatique (TRACC).

Jean-Michel Soubeyroux, directeur adjoint scientifique de la direction climatologie de météo France, a déclaré que les extrêmes climatiques sont des éléments classiques du climat. Mais l’évolution de plus en plus rapide de ces changements est un signal d’alarme. En effet, 75% des records de chaleur ont été battus entre 2019 et 2023. Quant à 2024, elle a été l’année la plus humide depuis 1960. Lors de cette conférence, M.Soubeyroux explique que “des nuits plus chaudes de 7°C sont à prévoir et la barre des 50°C sera atteinte dans les prochaines années.” Ceci aura des conséquences sur la santé des personnes, notamment de l’hyperthermie. De plus, une évolution de +15% des précipitations est à prévoir d’ici 2100. Les périodes de sécheresse vont se prolonger 1 à 2 mois de plus qu’en ce moment. Ceci va entraîner une évaporation de plus de 100 millimètres d’eau dans les réserves. Enfin, une élévation du niveau marin remarquable (+85cm) augmente le risque de submersions marines notamment à proximité des habitations. 

Comment anticiper les risques ? 

Le nombre de jours en vigilance orange et rouge de niveau de crue ont doublé. Ces crues engendrent des dommages importants pour la population et les biens. A contrario, nous n’avons été que 15% du temps en vigilance verte cette année, a rappelé Véronique Lehideux, cheffe du service des risques naturels et hydrauliques à la direction générale de la prévention des risques (DGPR). Pour anticiper les risques à venir, la DGPR se base sur le plan de prévention des risques naturels, géré par l’Etat, qui a pour but de maîtriser l‘urbanisation là où il y a des risques et inciter à réduire la vulnérabilité pour les biens déjà existants. 

Véronique Lehideux

Mélusine Boon-Falleur, professeure à Sciences Po et docteure en sciences cognitives, rappelle qu’une étude a constaté que 7 Français sur 10 se rendent compte des changements climatiques importants et que 9 Français sur 10 ont conscience que leur mode de vie va être perturbé par ces évolutions. C’est pourquoi il est nécessaire d’informer la population sur les pratiques collectives et individuelles à adopter. Ce message doit être relayé par d’autres organismes en plus de l’état, et doit devenir une norme sociale de diffusion des pratiques afin que tous les individus puissent s’adapter aux évolutions climatiques. Pour qu’une politique soit acceptée par la population, il faut que celle-ci soit équitable.  Les efforts doivent être répartis entre l’ensemble des individus et les dirigeants doivent montrer l’exemple.

Mélusine Boon-Falleur

Chrystelle Busk, directrice générale adjointe de la Caisse Centrale et Réassurance (CCR), décrit une augmentation des indemnisations des catastrophes naturelles. Le rôle de la CCR est de protéger les assureurs contre les risques extrêmes et naturels. Elle rappelle que, lors de la crue de 1910, le niveau de la Seine est monté de plus de 8 mètres. Une étude de ses services évalue à 35 milliards les dégâts qu’une telle inondation engendrerait en 2024.

Véronique Lehideux, Mélusine Boon-Falleur, Chrystelle Busk
Crue de la seine en 1910

Protéger les forêts

François Morneau, directeur de l‘institut pour le développement forestier, affirme que la superficie des forêts en France a doublé par rapport au siècle dernier. En 40 ans, une augmentation de 2 milliards de m3 de bois a été observée.

La nature n’est pas capable de suivre les changements climatiques aussi rapidement. Ceci provoque des fragilités dans les forêts : les arbres se brisent lors de vents plus ou moins violents. Les fortes chaleurs assèchent la végétation mais les pluies torrentielles peuvent aussi les noyer. Ce ne sont pas uniquement les changements climatiques qui fragilisent nos forêts, on retrouve également des champignons et des insectes qui mettent en péril leur croissance et leur évolution. Les forêts continuent de s’accroître mais à un rythme moins soutenu qu’avant.

Catherine Robert, coordinatrice national feux à Météo France, déclare qu’avec ces forêts beaucoup plus inflammables, une assistance est mise en place afin de surveiller et de contrôler les feux de forêt. Afin d’améliorer l’information de la population des cartes géographiques sont mises à disposition pour prévenir des départs de feux potentiels. Des actions de prévention peuvent être faites par chacun, notamment en respectant les obligations de débroussaillement, en évitant de jeter des mégots ou d’allumer des barbecues aux abords des forêts.

Éviter les déraillements 

On apprend par Benoit Chevalier, directeur du programme “Adaptation au changement climatique” chez SNCF Réseau que 25% du réseau ferroviaire est en zone inondable. Sur tout le territoire, le réseau est exposé au vent, à l’eau et au soleil. En effet, des vents violents peuvent endommager les voies, couper les câbles des caténaires sensibles aux chutes d’objets ou d’arbres. Les fortes sécheresses peuvent aussi être à l’origine de la chute d’arbres sur les voies. Une montée des eaux va entraîner un risque de submersion des voies ce qui peut provoquer un arrêt de circulation et des problèmes électriques. Enfin, les feux, souvent des feux de forêts dûs à une chaleur intense ou d’un fait plus ou moins volontaire, perturbent le roulement des trains et peuvent être dangereux pour la santé des personnes se trouvant à proximité. La SNCF déclare que 5% des retards sont dû à des incidents et 6% des annulations ont pour cause des arbres sur les voies. Le groupe réalise des investissements visant à s’adapter aux évolutions climatiques des prochaines années. Par exemple, en favorisant un boitier de caténaire blanc qui remplace un boitier noir. Cette action a permis de réduire de 20°C la température de celui-ci. Ce qui est important lorsqu’on sait que pendant quelques dizaines d’années les températures vont croître.

Zones inondable du réseau
Feux aux abords des voies

Jean-Pierre SERRUS, vice-président délégué aux transports et à la mobilité durable, région Sud – Provence-Alpes-Côte-D’azur, rappelle l’importance des transports dans l’évolution du climat. L’ensemble de l’industrie du transport, de produits ou de personnes, représente 1/3 des émissions de gaz à effet de serre.

Dans sa région il organise les actions autour de deux grands axes

  • adapter les dispositifs déjà existants,
  • penser le futur en visant plus de sobriété

Dans cette période de tempête budgétaire il pense important de sanctuariser les budgets relatifs aux transports. Il faut aussi prioriser, mettre le paquet sur les colonnes vertébrales.

Les coûts des dommages aux infrastructures de transport liés aux aléas climatiques en Europe sont estimés à 3 milliards d’euros par an entre 2011 et 2040, puis à 12 milliards d’euros par an d’ici 2071 à 2100. 

Réinventer l’industrie   

Éric Rigaud, chargé de recherche au centre de recherche sur les risques et les crises des Mines Paris-PSL parle des risques NaTech qui sont des accidents technologiques liés à des événements naturels. Ils représentent 2% des accidents dans l’industrie. Il évoque la complexification des territoires, et toutes les menaces pouvant les atteindre, la globalisation des marchés ainsi que des chaînes logistiques qui deviennent mondiales ont un impact très fort sur l‘évolution de la société. Toutes ces complexifications nous questionnent sur la manière d’aborder ces risques. Des couplages existent entre risques naturels et industriels. Par exemple, le NaTech de Fukushima provient d’un événement naturel, le tremblement de terre, qui a provoqué un tsunami, puis une vague qui a dépassé les digues, et a entraîné un court-circuit des systèmes électriques, déclenchant l’arrêt du circuit de refroidissement de la centrale. Tous ces évènements ont mené à une fusion du cœur d’un des réacteurs. 

Emmanuel Normant, directeur du développement durable de Saint-Gobain, alerte sur le fait que ce changement climatique a aussi un impact direct sur les industries. Des impacts qui peuvent s’avérer catastrophiques comme il nous le rappelle. Par exemple, un four verrier qui subit un arrêt brutal peut prendre en masse ce qui représente un vrai danger pour les ouvriers travaillant à proximité. 

Les outils Diag26000

L’association Diag26000 ne peut pas rester inactive face à ces nombreux défis qui attendent notre société. L’analyse des +23.000 diagnostics enregistrés par l’outil d’autodiagnostic, en accès libre via ce lien, montre que plus d’une entreprise sur deux est sensible à l’impact de ses activités sur le climat et met en place des actions pour le diminuer. Ce chiffre est paradoxalement plus faible pour les associations.

Depuis son lancement en 2012, cet outil permet de donner la parole aux dirigeants mais aussi aux collaborateurs de chaque structure. Avec les nouvelles fonctionnalités de 360 RSE développées cet été, vous pouvez maintenant aussi recueillir l’avis de vos parties prenantes avec des grilles optimisées pour chacune d’entre elles.

Le nouveau projet Matrice de Matérialité, dont les travaux viennent de démarrer, se rapproche de l’objet de ce billet. L’outil permettra de prioriser à la fois l’impact de vos activités mais aussi les risques pour votre organisation.

Lien de la vidéo : https://www.youtube.com/watch?v=XdXA84Pxhqs&t=9902s