Emmanuel Faber, ancien patron de Danone, est devenu président de l’ISSB en décembre 2021. Il est principalement connu pour ses engagements dans une transition durable. Son objectif est de vouloir réduire le GreenWashing en mettant en place un nouveau système de comptabilité qui mesurera l’empreinte climatique des entreprises. Son mandat consistera notamment à rédiger des normes que les entreprises pourront utiliser sur le plan social et environnemental afin d’offrir une plus grande comparabilité aux investisseurs.

Les projets d’ Emmanuel Faber.


Dans son interview par le journal Le Temps, Emmanuel FABER détaille deux types de risques.

Les risques physiques

Le premier est le risque physique. S’il n’y a pas suffisamment d’eau disponible, l’entreprise/l’usine peut cesser d’exister. Elles peuvent même disparaître complètement : selon le ministère de la Transition écologique, sur les 180 événements naturels graves recensés entre 1990 et 2017 en France, 90 % ont été causés par le changement climatique ; inondations, incendies, ouragans, tempêtes extrêmes… ces risques peuvent prendre plusieurs formes et peuvent aller jusqu’à détruire entièrement les entreprises. Par exemple, récemment, il y a eu des fortes inondations en Allemagne et en Belgique (été 2021).

La transition

La deuxième nature du risque est la transition. Par exemple, si on interdisait les moteurs thermiques pour les voitures, les entreprises qui les fabriquaient perdraient toute leur activité.

Par conséquent, la norme ISSB exigera une évaluation des deux types de risques pour évaluer la capacité d’une entreprise à gérer ces risques, à quel prix et avec quels investissements. Cela devrait orienter les investissements des fonds vers les entreprises qui peuvent mieux prévoir leur résilience climatique.

Le prix des ressources naturelles

Une entreprise n’existe pas sans l’accès aux ressources naturelles, au capital financier et au capital humain. Comment aujourd’hui accéder à une eau gratuite ? Pour information l’agriculture utilise 60% de l’eau non salée dans le monde et en gaspille 70%, à cause de l’évaporation, des pertes etc. Il faut donc stopper ce fort gaspillage. Au lieu de devoir arrêter une usine par manque d’eau, une autre option consiste à gérer le système aquifère de cette usine, en assurant son alimentation en eau pendant environ quinze ans. Pour cela Emmanuel Faber, ancien patron de Danone, de par ses anciennes expériences, parle de mettre en place des accords pour faire apparaître le vrai coût d’accès à la ressource. Il veut fournir l’information aux marchés financiers qui refléteront les émissions de carbone dans les prix de marchés.

« Protéger les plus vulnérables pour que tout le monde trouve sa place dans cette transition est essentiel »

E. Faber

Le conseil d’administration

Les patrons d’entreprise sont conscients de tous ces risques, mais la grande majorité des comités de direction estime que leur conseil d’administration n’est pas équipé pour traiter les sujets de durabilité.

Les normes, mises en place par Faber, incluront donc des questions très précises sur la formation de ces conseils d’administration, sur les processus de validation des stratégies de résilience et sur le temps que le conseil consacre à ces questions. Pour lutter contre le réchauffement climatique, les entreprises doivent pouvoir mesurer leur impact sur l’environnement et le communiquer au public selon un langage commun.

Communiquer sans greenwashing

Le greenwashing et l’«ESG-washing» sont une réalité car on ne dispose pas de langage commun fiable (c’est à dire d’un nouveau système de comptabilité traitant les risques et la consommation des ressources évoqués plus haut). Des entreprises choisissent un indicateur qui les arrange puis le changent l’année suivante si c’est dans leur intérêt. En conséquence, les investisseurs y croient assez peu et ne s’engagent pas. Les chiffres de la finance durable restent subjectifs à l’échelle mondiale. Ils ne sont pas du tout à jour par rapport aux enjeux. Néanmoins, Emmanuel Faber est vraiment favorable à cette forme de finance qui pour lui est nécessaire. Son objectif est qu’il n’y ait plus de «finance durable», mais qu’elle devienne la finance de tout le monde.

Il faut donc éviter un désaccord au moment où les marchés financiers ont besoin de trouver de la transparence sur les questions environnementales, sociétales et de gouvernance (ESG). Pour cela, il faut établir le langage commun.

« Les marchés financiers sont aujourd’hui le seul connecteur économique universel. Leur donner les informations nécessaires à l’allocation des investissements vers la résilience climatique et sociale des entreprises est le chemin le plus direct vers la transition que nous devons opérer dans les 10 années qui viennent. »

https://www.linkedin.com/in/emmanuelfaber/

La réduction des émissions

Les entreprises devront divulguer les informations suivantes relatives à la future comptabilité «verte» : au niveau du climat, elles révéleront leurs émissions de gaz à effet de serre annuelles dans un cadre unique et comparable dans le monde entier (universel).

Demain, des entreprises qui ne seront pas sur la trajectoire qu’elles auront annoncée pour la réduction de leurs émissions seront sanctionnées par les investisseurs. De même que les entreprises émettent aujourd’hui des avertissements sur résultats, elles feront sans doute des «carbon warnings» à l’avenir.

E.Faber

24 ans chez Danone

Rentré en 1997 chez Danone, Emmanuel Faber a aidé cette entreprise à devenir un symbole d’entreprise responsable. Il avait réussi à rendre visible la RSE au-delà des cercles professionnels, jusque dans la perception de la marque par les consommateurs, ce que Riboud n’avait pas sur faire . Danone est devenue la première entreprise du CAC 40 à se doter d’une mission environnementale et sociale ambitieuse en juin 2020.

Cependant, lors de sa nomination comme Directeur Général de Danone en 2015, Capital nous alertait sur certaines contradictions du personnage : ses 8 années au conseil d’administration de Ryanair, compagnie bien connue pour ses contrats précaires, ou son rapport coupable à l’argent… Il a aussi été constaté que l’engagement environnemental ne date pas de l’arrivé de Faber, ce n’est pas lui qui a amené cela, il n’a pas « révolutionné » l’engagement de Danone contrairement à ce que nous pouvions croire. Ce n’était pas quelque chose de nouveau mais une continuité (Danone étant très engagé depuis le début de sa création).

Une chute brutale

Son mandat chez Danone avait été renouvelé en 2019 avec un taux favorable des actionnaires de plus de 80%. Par la suite, E.Faber à finalement été émis de ses fonction de DG par le conseil d’administration de Danone en mars 2021, décision prise par les actionnaires qui étaient contre sa gouvernance. Mais alors pourquoi ?

Son licenciement a été expliqué selon différentes versions. Pour les actionnaires, Emmanuel Faber se concentrait trop sur la RSE de Danone et ne générait pas assez de profit. Ce qui n’est pas un bon signe pour l’avenir de la RSE chez Danone. De plus il avait était accusé de concentrer trop de pouvoirs au sein de l’entreprise (constatation faite par des experts de la normalisation extra-financière. Mais une autre version, moins mise en avant, a été dévoilée par certains journalistes.

Un constat différent en interne

Des acteurs de au sein de l’entreprise ont souligné le fait que certains éléments de son parcours était en « décalage total avec son image publique ». Il a été accusé/critiqué pour son management autoritaire qui avait entraîné des démissions de cadres en désaccord avec sa politique. De multiples de ses réorganisations auraient épuisé le personnel (enquêtes effectuées etc). Enfin, il aurait aussi mis en place un plan de licenciement de 2 000 personnes alors que le bénéfice de l’entreprise était stable avec en plus des dividendes versées aux actionnaires qui augmentaient de 8%.

Réussira-t-il ?

Nous venons de voir que les avis au sujet d’Emmanuel Faber sont contrastés. Cela n’empêche pas son nouveau projet avec l’ISSB d’être prometteur. Il se montre impliqué et déterminé pour faire avancer les choses le plus rapidement possible. Comme le rappeIle Pascal Demurger, Faber reste un personnage emblématique de l’engagement ce qui permettra de faire de l’ISSB un bon outil pour la mesure de l’impact des entreprises. Pour exemple, en 2018, il avait initié le Collectif pour une économie plus inclusive en France, qui réunissait 13 entreprises, puis 35 et avait pour objectif de créer 60 000 postes d’alternances en 2019. Il se montre proche des gens, humble et naturel ce qui fait de lui un homme/une personnalité publique très apprécié/e.

On constate aussi qu’Emmanuel Faber a un taux d’engagement sur twitter d’environ 15 fois supérieur à la moyenne des comptes possédant des communautés de taille similaire. Ce qui peut être intéressant pour le rayonnement de l’ISBB.

A chacun de se faire son propre avis sur le projet tout en sachant les bonnes et les mauvaises décisions/actions antérieures d’Emmanuel Faber. Il suffit maintenant d’attendre de voir comment va évoluer ce fabuleux projet qui sur le papier est encourageant !

Les normes extra-financières sont clés pour l’avenir de la RSE et de notre planète. Mais l’ISSB n’est pas le seul à avancer sur ces sujets. Une autre initiative est poussée par l’EFRAG. Pour en savoir plus sur les différences entre les deux, consultez notre précédent billet sur ce sujet.

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